“Truth Teller”, le nouveau détecteur de mensonge


Le Washington Post a lancé en janvier dernier une application qui révolutionne le “fact-checking”. L’outil propose d’analyser automatiquement la véracité des discours des politiciens. Retour sur une innovation présentée en avant-première française aux Assises internationales du journalisme.

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La communication politique vit-elle ses dernières heures ?  Le Washington Post tente d’apporter des éléments de réponse, en lançant une plateforme appelée “Truth Teller”  (révélateur de vérité) qui pourrait marquer un tournant pour le “fact-checking”.  Cette pratique très répandue aux États-Unis consiste à vérifier les faits, notamment lors des discours des hommes politiques. L’idée n’est évidemment pas de savoir s’ils vont tenir ou non leurs promesses de campagne, mais bien de contrôler la véracité des informations qu’ils avancent et des chiffres qu’ils présentent, de façon automatique, et presque en temps réel.

Steve Ginsberg est à l’origine de cette idée novatrice. Deux ans plus tôt, à Indianola, dans l’Iowa, le chef du service politique du Washington Post assiste à un discours de Michele Bachmann, candidate aux primaires républicaines. Il est stupéfait par les propos que tient la femme politique. A la suite du discours, il téléphone immédiatement à Cory Haik, responsable du numérique au Washington Post. « Elle a menti pendant 45 minutes sans que personne ne s’en aperçoive. Y’a-t-il quelque chose que nous puissions faire contre cela ? », s’interroge t-il. Quelques mois plus tard, un coup de pouce du Knight Prototype Fund et la première version du “Truth Teller” est opérationnelle.

Le citoyen pourra vérifier les discours lui-même

Encore en cours de développement, l’application extrait le son de la vidéo du discours, puis la retranscrit. Le texte est ensuite passé au crible par un algorithme qui compare les informations avec celles stockées dans une importante base de données créée par des journalistes. Enfin, l’application indique à l’utilisateur si les faits sont avérés ou non. L’objectif du Washington Post est de permettre un jour à n’importe quel citoyen d’utiliser son smartphone lors d’un discours pour vérifier en temps réel les déclarations du politicien.

Le chemin est encore long, mais le quotidien américain a déjà annoncé fin septembre le lancement d’une version Beta du “Truth Teller”. Un pas vers plus de vérité. 

Le « fact-checking » en France

Si en France le « fact-checking » n’est pas nouveau, il s’est généralisé avec les élections présidentielles de 2012. Aujourd’hui, la plupart des grands médias lui consacre une rubrique, à l’image de Libération avec son blog “Désintox” ou du Monde avec “Les décodeurs”,  mais aussi France Info et Europe 1 de façon quotidienne. Face à l’afflux d’informations, ce travail demande beaucoup de temps et de minutie. La contribution des internautes peut être précieuse pour un “fact-checking” plus rapide et plus efficace et l’explosion des réseaux sociaux laisse penser que cette pratique journalistique a de beaux jours devant elle.

Yannis Bouaraba


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Le programme de recherche OBSWEB - Observatoire du webjournalisme (CREM - Université de Metz) étudie les transformations en cours au sein de la presse d’information avec l’avènement d’Internet et de l'écriture multimédia.