Les transformations et mutations des équipes rédactionnelles sont au cœur de l’évolution du métier de journaliste. Aux Assises du Journalisme 2013, une table ronde consacrée à la recherche tente d’apporter des précisions à la façon dont sont perçues ces innovations pour la profession. Aurélie Aubert, la modératrice de la conférence et maître de conférences en sciences de l’information et de la communication à l’université de Paris 8 revient sur ce qui a été abordé et développe son point de vue.

Aurélie Aubert lors de sa modération de la table ronde sur les transformations et mutations des équipes rédactionnelles.
Lors de la conférence, dans la première partie notamment, le terme de “rupture” a beaucoup été utilisé. Pensez vous que c’est une bonne manière de qualifier les mutations des équipes rédactionnelles ?
La réalité c’est que les changements et mutations technologiques qui ont affecté la profession sont là depuis très longtemps. La première présentation de Christine Leteinturier a bien montré que c’est quelque-chose qui est monté en puissance. Donc non, on ne peut pas vraiment parler de rupture. Mais c’est vrai qu’avec la crise dans le journalisme et les réductions d’effectifs, la profession a vécu cela de manière douloureuse et c’est aussi pour cette raison que ce terme a émergé. Il y a eu une accélération ces dernières années.
Et à quoi est-ce qu’on doit cette accélération ?
Les outils eux mêmes vont plus vite, mais on n’est pas obligé de s’y soumettre; il y a aussi des journalistes qui choisissent de ne pas du tout suivre cette logique, avec les mooks par exemple. Il évident qu’il y a beaucoup de nouvelles technologies qui apparaissent et qui donnent l’impression d’une accélération. C’est pourquoi la recherche doit s’assurer que cela est exact.
Est-ce qu’on doit imputer la transformation des équipes rédactionnelles à l’évolution technique ?
Il ne faut pas faire de déterminisme : ce n’est pas la technologie qui provoque tous les changements, c’est un processus qui en accompagne d’autres. Les équipes rédactionnelles changent, elle mutent parce que la société évolue et qu’il faut répondre à ces évolutions. Les journalistes s’approprient les techniques et en font quelque-chose, il y a des usages des techniques, elles ne sont pas superpuissantes.
Selon vous, les mutations sont-elles appréhendées de manière positive ou négative par les journalistes ?
Je pense qu’on est dans une situation difficile à cause de la crise, des réductions d’effectifs, etc. Ce n’est pas toujours très bien perçu. Mais la profession sait s’adapter, je pense qu’elle réagit avec pragmatisme. Il y avait jusqu’à récemment une dichotomie entre rédactions web et rédactions traditionnelles qui à mon sens est en train de s’effacer. On constate tout de même que dans certains titres elle existe toujours, certains journalistes qui n’ont pas été formés au web refusent de travailler de cette manière. A mon avis ça tend à s’effacer et il y aura de plus en plus de rédactions “intégrées” c’est à dire où il font tout.
Comment abordez-vous la transformation des rédactions avec vos étudiants ?
On a une licence de sciences de l’information et de la communication où on a une mineure qui s’appelle média et médiatisation, certains cours donnent aux étudiants des connaissances sur le champ des médias. Ils ont des intervenants professionnels qui sont amenés à leur parler de la mutation des façons d’écrire notamment. C’est aussi un travail pédagogique de nos équipes puisqu’on fait évoluer les enseignements, par exemple à la rentrée prochaine on aura un enseignement sur “informer en réseau”. C’est un aller-retour entre la pédagogie et ce qui se passe sur le terrain.