Journalistes de demain : tous robots ?


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Et si le journaliste de demain était un robot ? C’est en tout cas une question qui se pose de plus en plus sérieusement… Notamment depuis le coup d’éclat du Monde, qui, fin 2015, a utilisé des machines afin de publier les résultats des élections départementales commune par commune. Une pratique qui interroge : les journalistes sont-ils amenés à être progressivement remplacés par des systèmes automatisés ? Alors que le numérique a fait son entrée dans le journalisme, et que le métier essaie encore de s’y adapter, la robotisation constitue-t-elle un nouveau défi ?

 

Un robot-journaliste, qu’est-ce que c’est ?
Le robot-journaliste est défini comme un algorithme transformant des données en texte, le tout dans un ton neutre. L’objectif ? Donner une information claire et précise, purement factuelle.

Parmi les précurseurs en la matière, on peut citer le Los Angeles Times. En 2014, Quakebot, un programme mis au point par Ken Schwencke – développeur embauché par le journal – a permis de publier un article trois minutes après qu’un séisme a frappé la Californie. Le robot s’était appuyé sur les algorithmes qui exploitent les données du site US Geological Survey, chargé de surveiller l’activité sismique de la planète : magnitude, épicentre, heure d’un séisme… Mais le Los Angeles Times projette d’aller encore plus loin en mettant au point des robots-journalistes capables de nourrir la rubrique nécrologique de leur site internet.

Entre opportunités et menaces
Si certains y voient une menace pour leur métier, d’autres envisagent les robots-journalistes comme une véritable opportunité dans les rédactions. Ces machines seraient tout d’abord l’occasion de « libérer les journalistes des tâches les plus ennuyeuses, les plus répétitives, pour qu’ils puissent se consacrer à la partie noble de leur métier » selon Kris Hammond, directeur scientifique du programme Quakebot. Pour les journalistes, cela représenterait donc un temps qui serait plus propice à mener des enquêtes de fond qu’à travailler sur des articles purement factuels. D’autres mettent en avant le gain de temps entraîné par un traitement de données en masse. De plus, l’article généré par un robot serait systématiquement relu par un journaliste en chair et en os avant publication.

Alors, les robots-journalistes vont-ils permettre d’améliorer la qualité de l’information ? Pas si sûr, à en croire Samuel Laurent – ayant travaillé sur les résultats automatisés des élections départementales – qui énonce une évidence : Impossible pour un journaliste de relire les 36.000 articles, ou alors cela prendrait un temps considérable… Annihilant ainsi le gain de temps offert grâce aux algorithmes.

À l’aube d’une nouvelle ère ?
D’autres limites viennent encore se poser. Financières tout d’abord : Quel est le coût d’une telle technologie ? Tous les médias y auront-ils accès ?
Éthiquement parlant, quelle est la part de responsabilité du journaliste face aux algorithmes ?
La question du style interroge également : trouver un ton, utiliser l’ironie, contextualiser par rapport à une période de l’histoire, être engagé… Sont encore loin d’être à la portée des robots et des lignes de code. Tous ces éléments ne constituent pas des données fixes et immuables. Et puis, si la systématisation est considérée comme une menace : est-ce la plus importante à laquelle les journalistes doivent faire face ?
Si la robotisation du journalisme n’en est encore qu’à ses débuts, ces questions devraient prochainement trouver des réponses dans l’univers journalistique, amené à automatiser de plus en plus de données. À l’image de Kris Hammond, certains spécialistes parient déjà que d’ici 15 ans, près de 90% des articles seront rédigés par des robots.